Les lois de l’attraction sont impénétrables et le premier jeu du studio indépendant Mighty Polygon en est le parfait exemple. Fondé en 2015 par des amis désireux de créer des jeux vidéo narratifs se focalisant sur le gameplay et l’aspect visuel, le studio accouche presque cinq ans plus tard de leur premier bébé, un puzzle game plutôt réussi mais qu’on apprend à aimer malgré ses défauts.
Je ne suis pas prêt, la Lune a tourné
Dans un futur plus ou moins lointain, le docteur Angelica Patel travaille dans un laboratoire situé sur la Lune dont l’objectif est de mener des expériences autour du Relicta, une roche d’origine inconnue qui semblait présente dans son sous-sol bien avant que l’Homme pose le pied sur le satellite de la planète bleue. En exploitant les propriétés de cette « relique », l’équipe de chercheurs a réussi à terra-former l’environnement autour de la base où ils ont crée des parcours de tests afin de mener leurs recherches. Mais un jour, un événement va se produire et le docteur Patel ainsi que toute l’équipe se retrouvent disséminés aux quatre coins de la station. Vous incarnez donc Angelica, la seule qui est en mesure de pouvoir sauver tout le monde. Mais pour retrouver la trace de ses collègues, elle va devoir franchir tous les tests qu’ils ont mis au point dans les différents biomes, l’occasion pour le joueur de résoudre de nombreuses énigmes basées sur la gravité et le magnétisme.
Je remonte le fil de mes pensées
Le coeur même du gameplay de Relicta est assez classique : votre parcours est ainsi interrompu par des portes de différentes couleurs qui sont reliées à des plaques et qui ne s’ouvrent que si une pression est appliquée sur celles-ci. Cette pression peut être exercée par vous-même mais aussi, et le plus souvent, par des blocs. Très vite, vous pourrez modifier la polarité de ces blocs et jouer avec la gravité. Mis en évidence par une couleur bleue et rouge, ces éléments répondent à l’une des propriétés élémentaires de la matière : les opposés (couleurs différentes) s’attirent et les semblables (couleurs identiques) se repoussent.
Au départ, les énigmes sont simples et font surtout offices de tutoriels. Mais très vite, les choses vont se compliquer. Heureusement, la progression dans le jeu est linéaire tout comme la difficulté des puzzles proposés. Lorsque vous découvrez une nouvelle mécanique de gameplay, le jeu a tendance à vous mettre d’abord face à des énigmes accessibles vous permettant de l’appréhender. Ensuite, la difficulté monte d’un cran et le jeu considère que vous avez compris. Les énigmes suivantes vous demandent alors d’appliquer ce que vous avez appris… en espérant que ce soit bien le cas. En effet, le jeu ne vous expliquera rien et ne vous prendra pas par la main. Ainsi, même si la difficulté monte progressivement, ça sera toujours à vous de vous creuser les méninges pour tenter de comprendre ce qu’on attend de vous.
Je suis libre mais je fais toujours le mur
Pour corser encore plus vos affaires et varier aussi un peu les plaisirs, d’autres mécaniques sont introduites par la suite notamment au niveau de l’environnement. Le jeu n’hésitera pas à altérer celui-ci ou à modifier certaines règles du jeu pour vous mettre des bâtons dans les roues. Plus vous avancerez dans le jeu, plus celui-ci s’amusera à combiner ces différentes mécaniques. Et au bout d’un moment, la difficulté deviendra plutôt élevée – bien que jamais insurmontable. Malheureusement, il n’y a aucun système d’indices dans le jeu. Même l’IA qui vous accompagne tout du long ne fait pas office d’aide en cas de souci. Bon, en 2020, ce n’est pas forcément problématique car vous pouvez trouver la solution à une énigme récalcitrante sur YouTube mais c’est dommage de ne pas avoir inclus cela. En plus de ça, vous serez embêté par la physique parfois aléatoire du jeu comme des blocs qui ne se dirigent pas là où vous l’auriez souhaité. La gestion de la physique a été amélioré par une mise à jour du jeu mais il reste encore quelques situations qui pourront vous agacer si vous n’êtes pas patient ou, au contraire, si vous avez de la chance, peut-être que vous parviendrez à résoudre une énigme sans le vouloir.
Si c’est un jeu de rôle, avais-je les épaules ?
Relicta est aussi un jeu narratif mais là où dans la plupart des jeux du genre cette narration est secondaire – souvent présentée par des documents à lire ou des enregistrements à écouter – le jeu de Mighty Polygon se montre plus direct. De très nombreux dialogues échelonnent votre voyage que ce soit avec l’IA ou les membres de l’équipe de recherches et vous ne pouvez pas y couper. C’est un choix discutable car beaucoup de joueurs n’hésitent pas à zapper ces éléments surtout que l’histoire de Relicta n’est pas très intéressante et permet surtout de proposer un contexte. Entre chaque « niveau » vous en apprendrez donc plus sur les événements qui ont amené à cette situation et – bien sûr – sur le Relicta lui-même. Il y a également deux fins possibles mais aucun objectif à remplir ou de secrets à découvrir, tout dépend d’une décision que vous devrez prendre à la fin du jeu et vous pouvez recharger votre sauvegarde pour prendre l’autre décision.
Pris dans les lois de l’attraction
En ce qui concerne les graphismes, Relicta affiche de très jolis décors et paysages avec des effets de lumière réussis. On est habitué pourtant à une certaine sobriété dans les puzzle games mais là, on se trouve plutôt dans le haut du panier. La variété est également de mise, le jeu étant divisé en plusieurs zones chacune proposant différents environnements. On pourra toutefois regretter que ceux-ci ne soient pas un peu plus vivants. On se sent très vite seul avec nos cubes durant la quinzaine d’heures que propose l’aventure. Oui, c’est approximativement le temps nécessaire pour voir défiler le générique de fin. Bien entendu, ce temps peut être moins court ou surtout beaucoup plus long en fonction de chaque joueur. En tout cas, peu importe le temps que vous y passerez, le voyage vaudra le détour si vous aimez les énigmes qui sont, la plupart du temps, gratifiantes une fois résolues.
ON A AIMÉ
+ Le jeu est très joli bien que les environnements soient assez vides
+ Une difficulté progressive et bien dosée
ON A MOINS AIMÉ
– La physique de certains éléments est très aléatoire… et ça peut être énervant
Il est difficile de conseiller Relicta à tout le monde, notamment parce-qu’il s’agit d’un puzzle game, un genre de jeu qui représente une niche de joueurs bien définie. Mais la première production des espagnols de Mighty Polygon n’est pas exempt de défauts ce qui pourrait rendre frileux même les amateurs d’énigmes. Pourtant, en insistant un peu, on découvre un jeu agréable à l’oeil et plutôt réussi. Même si on peste parfois contre la physique « alunissante » des blocs, on continue à avancer au sein de ces énigmes parfois très difficiles mais gratifiantes. Si vous cherchez à faire chauffer vos neurones, le jeu est proposé à un prix doux qui vous permettra peut-être de tolérer plus facilement ses défauts.
Un grand merci à l’agence LU6.1 et en particulier à Julie et Océane pour nous avoir permis de tester le jeu.