La semaine dernière était une date à retenir dans l’actualité Stadia puisqu’il s’agissait du premier anniversaire de la plateforme de cloud gaming de Google. Nous avons eu l’occasion de revenir sur le bilan de cette année tumultueuse sur notre blog mais de nombreuses “personnalités“ travaillant sur Stadia ont eu l’occasion, également, de s’exprimer sur le sujet et surtout, d’évoquer l’avenir du service, notamment en ce qui concerne les jeux car, après tout dans le secteur, c’est le nerf de la guerre et c’est ce qui a souvent été reproché à Stadia.
Une première année marquée par de franches réussites – soyons honnêtes, Stadia fonctionne et incroyablement bien – mais aussi pas mal de ratés entre les fonctionnalités promises qui ont tardé à arriver et les jeux qui arrivaient au compte-gouttes. C’est Jack Buser – qui officie en tant que “Director of Games“ chez Stadia – qui a pris la parole via le site MobileSyrup pour tirer son propre bilan de cette année écoulée.
Il n’y a aucun précédent à Stadia. Jusqu’alors, la première XBox était la dernière fois qu’une toute nouvelle plateforme était construite à partir de rien. Et avoir la chance de travailler sur cette occasion unique, c’est la chance de toute une vie. Mais c’est vrai qu’au-delà de ça, cette première année n’a pas été parfaite. C’est aussi ce qui rend ce voyage aussi excitant : vous ouvrez de nouvelles voies sur un territoire complètement inconnu.
Stadia le sait, le calendrier des joueurs et leur propre calendrier ne sont pas les mêmes. Pourtant, Jack Buser le maintient : Stadia se construit étape par étape, cette première année ayant servi à poser les fondations pour les années suivantes. Et visiblement, chez Google, on est conscient de l’effort que ça demande aux joueurs d’être patient.
Il y a une phrase en japonais, c’est “ippo zutsu“. Cela signifie “pas à pas » et nous savions pertinemment, l’année dernière, que nous ne faisions que le premier pas en direction de cette vision du monde des jeux vidéo. Et il y a bien d’autres pas à réaliser et qui nous attendent.
On vient de loin et nos efforts commencent à payer. On le sait car nous sommes présents au sein de la communauté – sur Reddit par exemple. La communauté Stadia est vraiment l’une des meilleures communautés au monde.
Pourtant, la communauté gaming – en son sens le plus large – est loin d’être aussi compatissante. Stadia est victime d’un bad buzz depuis son lancement, certes à cause de véritables arguments principalement liés aux fonctionnalités qui ont mis du temps à arriver et au catalogue de jeux qui ne s’est pas étoffé assez rapidement mais aussi en raison d’un acharnement sur les réseaux sociaux où on peut lire de tout en ce qui concerne la plateforme de Google. Ce à quoi Jack Buser répond tout simplement qu’il suffit d’essayer par soi-même.
Essayez. Cela vous coûte rien. Une seule URL : stadia.com. Vous cliquez et vous avez accès instantanément et gratuitement à une trentaine de jeux (via l’abonnement optionnel Stadia Pro et son premier mois d’essai gratuit). Si ça vous plaît, et bien restez avec nous. Et si ça ne vous plaît pas, pas de soucis. Vous n’aurez pas dépensé le moindre centime et tout ce que ça vous aura coûté, c’est un peu de votre temps. Et d’ailleurs, on constate que la plupart des gens qui prennent la peine d’essayer reste avec nous ensuite.
D’un côté, c’est tout à fait normal. Stadia doit remplir deux missions périlleuses : d’une part, imposer sa technologie – le cloud gaming – et d’autre part, s’imposer aussi en tant que nouvelle marque. Dans le premier cas, il est important de démêler le vrai du faux car on peut lire beaucoup de choses fausses à propos de Stadia tandis que dans l’autre cas, c’est un travail de longue haleine qui ne fait que commencer pour les équipes de Google.
Tout petit nouveau dans cette industrie doit passer par là. Vous devez prouver aux gens ce que vous valez, démontrer aux joueurs – en l’occurence – que vous êtes là pour eux et que vous allez faire ce que vous avez promis de faire. C’est un travail sur le long terme dans le but de gagner leur affection. C’est ce qu’on fait depuis un an. Est-ce que c’est facile ? Non. C’est pour ça qu’il n’y a pas eu de nouvel acteur majeur dans le secteur depuis longtemps, c’est vraiment très difficile (rires).
Ces enjeux ont été d’autant plus compliqués à relever que cette année 2020 a été marquée par une crise sanitaire mondiale sans précédent qui a poussé de nombreux studios à retarder leurs jeux de plusieurs mois. À ce sujet, Jack Buser préfère se focaliser sur les aspects positifs de cette crise et de ce que Stadia, en tant qu’éco-système, a pu apporter comme réponses aux développeurs obligés de transformer leur façon de travailler afin de pouvoir travailler de chez eux.
Dans ce contexte sanitaire hors du commun, Stadia propose quelque chose de génial et d’unique à tous les développeurs qui ont du lutter face aux conséquences du COVID dans leur quotidien au travail. En effet, nous proposons tout notre environnement de développement dans le cloud donc de ce point de vue, le développement n’est que peu impacté. Vous n’avez aucun kit de développement physique au bureau et les ressources sont partagées très facilement. Beaucoup de développeurs – comme Bungie, studio à l’origine de Destiny 2 – ont d’ailleurs manifesté publiquement leur joie en disant “Merci Stadia, sans vos outils de développement, nous n’aurions pas pu respecter notre calendrier cette année.
Pourtant, paradoxalement, du fait que beaucoup de personnes se sont retrouvées confinées à domicile, la découverte du cloud gaming est tombée à point nommé et Stadia est vite devenue une plateforme de choix. Le point névralgique a été lorsque Google a lancé officiellement l’essai gratuit de Stadia au printemps. Ce n’était apparemment pas gagné d’avance et les ingénieurs et développeurs ont travaillé d’arrache-pieds pour que Stadia devienne accessible gratuitement le plus rapidement possible afin de pouvoir aider toutes les personnes qui n’avaient pas forcément de consoles ou de jeux.
Un public que Stadia a su séduire en arrivant au bon moment et en répondant à des besoins qui se faisaient ressentir. D’ailleurs, Jack Buser est très satisfait de voir à quel point Stadia attire des gens de tous horizons et de toutes affinités. Une pluralité qui, selon lui, sied parfaitement à la plateforme.
Stadia fonctionne actuellement dans 14 pays alors c’est vrai que les besoins des gens ne sont pas les mêmes en fonction du pays dans lequel vous êtes. Nous avons des anciens joueurs qui n’ont pas touché à un jeu vidéo depuis longtemps et qui re-découvrent tout cela grâce à Stadia. Ils ont un travail, une famille et n’ont pas autant le temps de jouer aux jeux vidéo que par le passé. Moi franchement, je n’ai pas le temps d’attendre plusieurs heures la fin d’un téléchargement. Il y a aussi ceux qui ne peuvent pas se permettre d’investir dans une console à 500€ ou même de payer leurs jeux 70€. Stadia est parfait pour ces gens-là. Vous n’avez rien à payer et vous avez un accès gratuit et instantané à une trentaine de jeux.
Mais pour lui, ce qui relie avant tout ces joueurs, jeunes ou moins jeunes, célibataires ou en couple, homme ou femme, ce sont deux des principaux avantages de Stadia : son côté pratique et sa valeur, c’est-à-dire tout ce qu’on peut obtenir grâce à Stadia échange d’un modeste abonnement de 9,99€ par mois.
Tout d’abord, il y a le côté pratique car vous pouvez jouer sur plein de supports que vous avez déjà chez vous. Admettons, on vous expulse du salon, et bien vous pouvez continuer votre partie, sans coupure, dans votre chambre ou ailleurs. D’autre part, ce qui remonte le plus souvent dans les témoignages, c’est que beaucoup de gens sont surpris de ce qu’ils obtiennent en échange de la modique somme de 9.99€ par mois. Et c’est vrai : le catalogue Stadia comporte actuellement une centaine de jeux et si je suis abonné à Stadia Pro depuis le lancement de Stadia, j’ai accès gratuitement à la moitié d’entre eux.
Pour revenir sur le bilan de cette année, il faut aussi mentionner – malgré la grande valeur de l’abonnement Stadia Pro – le fait que beaucoup de gens s’interrogent sur le modèle économique à abonnement. Beaucoup de gens sont déjà abonnés à d’autres services comme Netflix, Disney+ ou Spotify sans parler du cloud gaming lui-même où figurent déjà d’autres services payants comme PlayStation Now, XCloud et Amazon Luna. Mais d’après Jack Buser, ce n’est pas vraiment une préoccupation et, au contraire, cela aurait plutôt tendance à être rassurant.
Ce qu’on constate surtout, c’est le changement. Comme je vous le disais, notre plateforme est la première nouvelle plateforme construite à partir de rien et ce, depuis très longtemps. Et même si le streaming n’est pas une nouveauté dans le monde du jeu vidéo – des entreprises comme GaiKai et OnLive ont déjà travaillé dans le domaine auparavant – notre arrivée a ouvert les yeux de pas mal de monde. Du coup, c’est plutôt gratifiant. Rassurant, même. Si nous étions les seuls à avoir vu une opportunité dans le cloud gaming, on se serait demandé s’il n’y avait pas un problème (rires).
Comme on l’a dit précédemment, l’un des griefs qui a été beaucoup reproché à Stadia, c’est la pauvreté de son catalogue et ce, quand bien même la tendance s’est inversée jusqu’à ce qu’il atteigne aujourd’hui plus d’une centaine de jeux. Beaucoup de joueurs ont aussi reproché à Google d’avoir lancé sa plateforme sans aucune véritable exclusivité. Sur ce point, le “Director of Games“ essaient de calmer les esprits même s’il faudra encore attendre.
Nous avons 15 exclusivités actuellement et il ne s’agit pas que de titres venant de nos studios internes mais aussi de studios avec qui nous avons noué des partenariats comme Harmonix, Supermassive ou Uppercut. Donc vous pouvez vous attendre à entendre parler d’eux dans un avenir proche. Mais le plus intéressant, ce sur quoi nous travaillons en interne, n’arrivera pas l’année prochaine, je pense. Dans deux ans, vous pourrez enfin voir notre vision qui va commencer à se concrétiser réellement.
Nos équipes chez Stadia Games & Entertainment vont véritablement repousser les limites de ce qu’il est possible de faire en matière de jeux vidéo à partir du moment où vous pensez dès le départ au développement dans le cloud. Nous construisons des expériences qui s’affranchissent des limites physiques de votre console ou de votre PC, intégralement pensées pour le cloud et exécutées uniquement dans le cloud, le tout en lien avec YouTube. Qu’est-ce que ça peut bien vouloir dire selon vous ? Et on ne fait qu’effleurer la surface des possibilités de ce qu’on appelle déjà les jeux “cloud natifs“.
En vrai, il y a déjà des exemples mineurs – et pourtant pertinents – de ce que le cloud gaming peut apporter d’unique. Des jeux comme GRID, par exemple, qui inclut un mode permettant à 40 joueurs de s’affronter ou le Stream Connect (pouvoir apercevoir le flux vidéo de ses amis directement sur son écran en “picture in picture“) dans des jeux en équipe comme The Division 2 ou Ghost Recon Breakpoint, ce sont des choses qui ne sont pas réalisables ailleurs. D’autres mots compliqués comme le State Share (permettant de partager instantanément un moment d’un jeu et d’y donner accès via un simple lien) représentent également des fonctionnalités uniques à Stadia et ça sera disponible officiellement avec Hitman 3 en début d’année 2021.
Mais en ce qui concerne les jeux et uniquement les jeux, Jack Buser se veut très rassurant sur le fait qu’énormément de jeux sont déjà prévus et que les équipes de Google ont déjà peaufiné leur calendrier pour les deux prochaines années.
Ce que je peux vous dire, c’est que nous avons établi une roadmap (feuille de route) avec environ 400 jeux en cours de développement au sein d’environ 200 studios différents. Des jeux prévus pour l’année 2021 mais aussi pour les années suivantes. Donc est-ce qu’il y aura plus de jeux sur Stadia ? Absolument. Je vais être honnête, nous avons déjà terminé notre feuille de route pour 2021 et nous réfléchissons déjà à celle de 2022. Nous commençons même à nous projeter sur l’année 2023. Je peux vous dire que ça vous donnera une bonne impression de ce vers quoi on veut aller.
Enfin pour terminer, Jack Buser revient sur la polémique qui a frappé Stadia de plein fouet suite aux propos d’Alex Hutchinson, directeur créatif chez Typhoon Studios, un des studios rachetés par Stadia Games & Entertainment. Pour rappel, il avait publié plusieurs tweets où il disait que les créateurs de contenus sur Internet devraient rémunérer les éditeurs et les développeurs pour les gens qu’ils diffusent en stream. Même si Google s’était rapidement éloigné de cette polémique officiellement, le bad buzz a été violent et rapide, ce dont Stadia n’avait pas vraiment besoin.
Honnêtement, cela ne représente pas du tout la pensée de Stadia, de YouTube ou de Stadia Games & Entertainment. Au contraire, nous faisons notre possible pour favoriser cette symbiose entre développeurs, créateurs et joueurs et nous pensons que cette relation est puissante et profite à tous. Nous construisons Stadia pour que cette relation soit encore plus forte à l’avenir. Des fonctionnalités comme Crowd Choice fonctionnent parfaitement bien avec les créateurs de contenus. Regardez des streams de Baldur’s Gate 3 par exemple où on voit le public prendre les décisions à la place du joueur, c’est génial de voir les joueurs et les créateurs en symbiose autour d’un même jeu.