Nul besoin de présenter Far Cry, la célèbre licence d’Ubisoft qui, depuis 17 ans, nous emmène dans des territoires faussement paradisiaques dans le but de survivre, mener une guerre ou encore renverser un despote qu’il soit un tyran sanguinaire ou le gourou d’une secte. Après Rook Island dans l’Océan Pacifique, la région de Kyrat dans les sommets de l’Himalaya ou encore le comté de Hope County dans le Montana aux États-Unis, l’éditeur français nous emmène cette fois à Yara, une île située dans les Caraïbes, inspirée de Cuba, où certains habitants luttent tant bien que mal contre la dictature de son dirigeant, Anton Castillo. Mais avec ce sixième épisode canonique qui fleure bon la révolution, on est en droit de se demander si la série a, justement, menée la sienne. Verdict après de nombreux coups de feu et coups de soleil.
Ce test a été réalisé grâce à un accès au jeu fourni par Google et Ubisoft, un grand merci à eux !
Elle m’emmène avec elle, je t’emmène avec moi, Yara
Vous allez incarner cette fois Dani Rojas, originaire de Yara, une production locale, donc, qui contrairement à la majorité de ses connaissances qui jouent les guérilleros, ne souhaite qu’une seule chose : s’échapper de l’enfer qu’est devenu son île. Beaucoup ne comprennent pas sa décision de ne pas vouloir se battre pour sa liberté et sa préférence pour la fuite mais qu’à cela ne tienne, l’opportunité pour s’enfuir vers les États-Unis, des rêves de bronzette sur le sable chaud de Miami plein la tête, s’est présentée et Dani compte bien la saisir.
C’est d’ailleurs comme ça que commence le jeu, en nous mettant directement dans l’ambiance alors que les troupes d’Anton Castillo attaquent le quartier où se trouvent notre héros (ou héroïne, c’est au choix) et ses potes. S’en suit une longue course poursuite et une partie de cache-cache dans les rues de la ville pour espérer atteindre le bateau de fortune, clé de l’échappatoire. Mais malheureusement, le hasard ou le destin s’en mêle. Diego, le fils du dictateur tant redouté, est à bord de la chaloupe. Retrouvé par son père, ce dernier n’hésite alors pas à faire couler l’embarcation après avoir récupéré son rejeton.
Ce n’est pas ma guerre, à moins que…
Vous vous réveillez finalement sur une plage déserte aux abords de Yara, miraculeusement en vie. Grâce à quelques indices laissés ça et là, vous partez sur les traces de ce qu’il reste de la résistance. Avec uniquement une machette et quelques balles de pistolet avec vous, vous déambulez dans la jungle et entre les bunkers de l’armée dans l’espoir de trouver votre chemin. De quoi vous laisser le temps de choisir entre la liberté tant désirée ou la lutte pour mettre fin à ce régime sanguinaire…
En effet, fidèle à ses convictions, Dani ne souhaite pas vraiment prendre part à cette guerre, surtout vu les maigres chances qui sont du côté de Libertad, nom donnée à cette résistance toute de bleu et de blanc vêtue. C’est même très drôle car si jamais vous tentez de quitter Yara, une cinématique se déclenche, vous montrant, trois mois plus tard, sur un transat à Miami, le générique de fin défilant au son rythmé de Conga de Gloria Estefan et des Miami Sound Machine.
Bien entendu, il s’agit d’une fausse fin où vous apprenez que la rébellion a été totalement anéantie par le régime de Castillo. Pour obtenir la vraie fin, et bien entendu jouer au jeu car c’est un peu pour ça que vous êtes là, vous devrez prendre les armes, rassembler les différents chefs guérilleros éparpillés dans les différentes régions de Yara et les unifier pour destituer une bonne fois pour toutes le dictateur en assiégeant la capitale. Autant dire que le chemin sera long et parsemé d’embûches…
Après avoir rejoint officiellement Libertad, vous aurez la liberté (oui bah hein…) de choisir votre destination. Yara est en effet principalement découpée en trois grandes régions, chacune abritant des résistants qui tentent de lutter à leur manière contre l’armée de Castillo. Même si la cheffe de la résistance vous suggère de commencer par les fermiers de la famille Montero, vous avez vraiment le choix d’où commencera votre aventure. Vous pouvez même aborder ces trois routes en parallèle, ça ne tient qu’à vous.
Anton donc le chant de la révolution
Dans tous les cas, vous découvrirez que ces gens sont dans des situations plus ou moins compliquées et il vous faudra leur venir en aide si vous voulez qu’à leur tour, il vous prête main forte lorsque vous vous déciderez à prendre d’assaut Esperanza, la place forte où se terre le dictateur à abattre. C’est d’ailleurs intéressant de constater que le jeu vous proposera assez rapidement une mission vous demandant de vous rendre là-bas. Mais il s’agit d’une place forte lourdement armée et ne vous faîtes pas d’illusions : pour déclencher l’ultime mission qui vous mènera jusqu’à la fin du jeu, vous devrez bel et bien jouer les bons samaritains dans toute l’île.
L’histoire de Far Cry 6 est d’ailleurs plutôt intéressante en soi, menée en particulier par la prestation de Giancarlo Esposito dont la prestation en tant qu’Anton Castillo impressionne. On comprend que le personnage a été crée et écrit avec le célèbre acteur de Breaking Bad ou The Mandalorian en tête et on est à la fois impressionné et glacé par les différentes scènes où il apparaît. Malheureusement, autant le scénario s’avère plaisant, autant il est un peu gâché par la structure du jeu.
En effet, le découpage de l’aventure en plusieurs parties distinctes empêche d’apprécier réellement les tribulations de notre héros et de tous les acolytes qu’il va rencontrer. Lorsqu’on a fini l’histoire d’une région et qu’on enchaîne sur une autre, on a un peu l’impression de repartir du début, ce qui pourra démotiver certains joueurs. Toutefois, il faut bien admettre que la palette de personnages est suffisamment variée et explosive pour relancer l’intérêt de cette longue guérilla urbaine.
Le récit est aussi rythmé par de nombreuses cinématiques, pour la première fois filmées d’un point de vue extérieur, et non intégralement vécues du point de vue de votre personnage comme dans les épisodes précédents. Certains sonneront le glas de l’immersion, mais cela autorise surtout Ubisoft à proposer une mise en scène bien plus léchée qu’auparavant. C’est peut-être ça aussi qui rend l’histoire plus intéressante. D’ailleurs, on notera au passage que le doublage français du jeu est d’excellente qualité, c’est toujours appréciable et important de le dire.
Il y a une différence entre jouer avec des armes et faire la révolution
Ce qui pourrait finir par vous lasser au fil des heures, c’est le nombre incalculable d’activités en tout genre qui parsèment la carte. Car oui, nous sommes bien dans un jeu Ubisoft ce qui signifie que Far Cry 6 applique à la lettre la recette des mondes ouverts de l’éditeur français. Points de contrôle à libérer et à transformer en points de voyage rapide, missions annexes, zones de chasse, coffres contenant armes, équipements et éléments cosmétiques à découvrir, chasses aux trésors… et la liste n’est pas terminée.
Dans ce supermarché de l’activité annexe, libre à chacun de faire ses courses et de repartir avec un panier plus ou moins gros. Attention, donc, à l’overdose en fonction de vos affinités avec ce que propose généralement Ubisoft dans ses productions. Il y a tout de même des choses plutôt marrantes à faire, comme ces cargaisons à aller récupérer dans un temps imparti ce qui oblige parfois à redoubler d’inventivité pour rejoindre le point de largage avant la fin du chronomètre ou encore les courses, qu’elles soient de jet-ski ou automobiles.
En tout cas, vous pouvez croire sur parole l’équipe marketing quand elle affirme que la carte de ce sixième épisode est la plus grosse jamais créée pour un Far Cry. Par contre, on pourrait se demander si Ubisoft n’en a pas fait trop. Difficile à dire car cela dépendra vraiment des goûts de chacun. Ce n’est en tout cas pas cette sixième mouture qui va vous réconcilier avec la formule si vous en êtes déjà dégouté. À l’inverse, si vous aimez le genre, vous prendrez littéralement votre pied pendant vos pérégrinations à Yara, un terrain de jeu véritablement extraordinaire.
Cette révolution serait-elle une juste cause ?
Et pourtant, même si cet épisode respecte en tout point l’ADN de la série et des mondes ouverts Ubisoft, on sent que les développeurs des studios de Milan et de Toronto ont tenté d’apporter quelques changements et nouveautés bienvenus. Ce qui saute peut-être le plus aux yeux, c’est l’atmosphère délirante dans laquelle baigne cet opus et qu’on retrouve plutôt d’habitude dans des licences comme “Just Cause“ et qui lui donne un cachet radicalement différent par rapport à ses aînés.
L’autre nouveauté qui nous frappe assez vite dans l’aventure, c’est la présence de camps de résistants qui seront des points d’ancrage réguliers au cours de votre guérilla. À l’intérieur de ces espaces sécurisés – outre la caméra qui passe étonnamment en vue à la troisième personne – vous pourrez retrouver tout ce dont vous avez besoin pour vous distraire (coucou les combats de coqs !) mais surtout pour vous préparer pour votre prochaine mission. Établi et ateliers, bâtisses diverses à construire et faire évoluer pour débloquer soit de l’aide comme avec la cuisine qui offre temporairement des bonus pour vous aider, soit avoir plus d’informations sur votre carte.
Au chapitre des nouveautés, notons également la présence d’un petit côté jeu de rôle avec de nombreux équipements à trouver et récupérer, chacun disposant de perks particuliers. En fonction de votre façon de jouer et d’aborder les situations, vous préférerez ainsi vous équiper d’une panoplie favorisant la furtivité ou la récupération de la santé, ou encore choisir une panoplie qui protège du feu ou qui inflige davantage de dégâts en fonction de certains types de munitions. C’est d’ailleurs ce système d’équipement qui sonne le glas de l’arbre de compétences, totalement absent de cette aventure aux Caraïbes.
Autre point inédit dans ce nouvel opus, vous pouvez personnaliser vos armes et leur attribuer, par exemple, différents types de balles (balles à têtes creuses, perforantes, explosives, empoisonnées…) pour faire face à tout autant de types d’ennemis plus ou moins bien protégés, et même des gadgets, histoire de leur donner quelques bonus comme agrandir le chargeur, améliorer la stabilité ou même pourquoi pas ajouter un silencieux… même sur une mitraillette. Hé oui, le système laisse une grande liberté pour trouver les armes de ses rêves. Le revers de la médaille, c’est qu’une fois que vous l’aurez trouvé, vous n’en changerez probablement pas jusqu’à la fin du voyage.
En terme d’équipement, impossible de ne pas mentionner l’apparition du Supremo, un gros sac à dos qui vous sera donné en début d’aventure et qui vous permet d’activer de temps à autre une compétence spéciale. Celle par défaut consiste à envoyer à courte portée plusieurs missiles pour des dégâts maximums et un nettoyage complet et fumant. Fort heureusement, le jeu veut s’adapter à vous (et non l’inverse) et on retrouve vite d’autres types de Supremo pour ceux qui préfèrent la discrétion ou disposer d’une défense plus solide.
Vous ne serez donc pas étonnés de découvrir éparpillés dans la nature de nombreux établis qui vous permettent justement de fabriquer tous ces éléments et de modifier votre équipement comme il se doit. Pour ça, il vous faudra de l’argent et des matériaux qu’on trouve heureusement en très grand nombre partout. Et en plus de découvrir vos joujous dans de nombreuses caches, vous pouvez aussi les acheter aux magasins qui se trouvent dans chaque lieu que la résistance aura libérée.
Commandante, j’ai des gars, là
Si mener la guerre seul vous inquiète, sachez que vous pourrez compter sur la présence des amigos, des animaux qui ne vous lâcheront pas d’une semelle et qui vous seront d’une aide précieuse. Que ce soit Guapo le crocodile qui fonce sur ses victimes pour les déchiqueter ou encore l’adorable Chorizo qui distrait les soldats tellement il est mignon, chacun d’entre eux peut correspondre à votre façon de jouer. Et si le premier s’obtient rapidement avec l’histoire, les autres doivent être débloqués grâce à des quêtes plus ou moins bien cachées.
Mais bien sûr, le plus fun, c’est de s’amuser avec un ami et Far Cry 6 ne déroge pas à la règle. Le mode coop fait donc son retour dans cet épisode et il permet de vivre l’intégralité de la campagne avec la personne de votre choix ! Et autant vous dire que l’expérience est vraiment grisante. Que ce soit pour approcher un fort ennemi en toute discrétion ou pour tout déglinguer dans un festival de feux d’artifice, on s’amuse vraiment énormément. Malheureusement, il est dommage que la progression dans l’histoire ne soit pas sauvegardée… seuls l’expérience, l’argent et l’inventaire sont préservés.
Si vous voulez vraiment faire le jeu entièrement en coop et sauvegarder chacun votre progression, vous devrez le faire deux fois, donc. En revanche, Ubisoft a eu la bonne idée d’ajouter des “opérations spéciales“, des missions prévues pour la coop et qui permettent en plus d’obtenir de la monnaie à utiliser pour débloquer des armes uniques. Au moins, l’avantage de ces « raids » c’est qu’ils peuvent être lancés indépendamment de votre progression dans le jeu, en plus d’être des contenus très sympas à faire. On aurait aimé qu’il y en ait plus, surtout qu’un seul est actuellement disponible.
L’autre point négatif de la coop sur cette version Stadia, c’est l’absence de cross play. Car si vous n’avez pas d’amis pour jouer, vous pouvez également recruter un joueur au hasard. En revanche, cette absence est compensée par la dernière fonctionnalité sociale développé par Google pour Stadia : les groupes publiques. Comme on l’avait déjà remarqué, ce matchmaking natif semble mieux fonctionner que les matchmakings internes à chaque jeu. Sans doute parce-que le joueur n’est pas obligé de lancer un jeu pour voir les groupes qui recherchent des joueurs.
Par contre, la version Stadia peut se targuer d’utiliser Stream Connect, une fonctionnalité unique à la plateforme de cloud gaming de Google et pour un jeu en multi coopératif comme Far Cry 6, c’est une véritable aubaine. Un petit encart de type “picture in picture“ se loge en haut à droite de l’écran et permet de voir à tout instant l’écran de son partenaire de jeu. En plein combat, il sait se faire plutôt discret tout en restant très utile pour connaître en temps réel la position de son coéquipier et ainsi communiquer plus facilement. N’hésitez pas à regarder ici notre séquence de gameplay en coop avec @thepaulconor.
Un FPS limité à 30fps sur Stadia
En ce qui concerne cette version Stadia justement, vous le savez sans doute déjà mais Ubisoft avait confirmé avant la sortie du jeu qu’il serait limité à 30fps sur la plateforme de cloud gaming de Google. En pratique, même si cela se ressent bien évidemment et qu’on espère vite une mise à jour débloquant le mode 60fps comme récemment avec Assassin’s Creed Valhalla, le jeu est vraiment très propre. Les développeurs ont su parfaitement mettre en valeur les environnements de Yara.
En fait, le problème vient davantage du jeu lui-même, tournant avec un moteur qui semble accuser le poids des années. On aimerait que les textures soient parfois plus nettes ou que les animations des personnages soient plus fluides. On aurait aussi aimé un peu moins de répétitivité dans certains éléments de décor et de level design. Mais le plus gros point noir sur le plan technique provient sans doute de l’IA des ennemis qui, au mieux, est incohérente, au pire, totalement stupidité. On ne compte plus le nombre de fois où notre approche furtive a été réduite à néant à cause d’un bug voire le nombre d’échecs de missions à cause d’un personnage non jouable qui ne sait pas conduire un camion qui nous transporte, par exemple.
ON A AIMÉ
+ Yara est une destination de rêve et un immense terrain de jeu
+ L’ambiance délirante sous fond de guérilla espagnole
+ Une histoire plaisante, un méchant charismatique
+ La coop, vraiment grisante et fun ! Encore plus avec Stream Connect
+ De nouvelles mécaniques et possibilités de gameplay
ON A MOINS AIMÉ
– Peut-être trop grand, trop plein, trop…
– Une IA qui oscille entre incohérence et stupidité
– Pas de cross play pour le mode coop
– Pas mal de bugs et le 30fps fera saigner les yeux de certains
– Un Far Cry jusqu’au bout du fusil, on aime ou on aime pas
Malgré de nombreuses nouveautés de gameplay bienvenues sur le papier mais dispensables en pratique, Far Cry 6 applique à la lettre la “formule Ubisoft“ et propose un FPS en monde ouvert immense, riche et criant de vérité. Si vous appréciez le genre, Yara sera pour vous la destination idéale et saura vous proposer autant de magnifiques panoramas que d’activités en tout genre pour passer des dizaines et des dizaines d’heures – seul ou avec un ami – à jouer les guérilleros jusqu’à – enfin ! – atteindre la conclusion de cette histoire plaisante mais un peu gâchée par la structure du jeu. À l’inverse, si vous êtes lassés de la formule, cet épisode ne vous fera probablement pas changer d’avis. Far Cry 6 est un très bon Far Cry, certes, mais la révolution attendra, donc. Ce qui est sûr en tout cas, c’est qu’Ubisoft a mis le feu aux poudres…
QU’EN PENSE LE RESTE DE L’ÉQUIPE ?
Warpanox
Plutôt difficile d’avoir un avis totalement fondé sur ce sixième opus de la saga Far Cry. Il faut dire que l’archipel de Yara est vraiment splendide, c’est un vrai plaisir de parcourir les différentes – et immenses – régions, à cheval ou avec les nouveaux véhicules, sur une ambiance de guérilla espagnole vraiment sympa. En dehors de ce beau tableau, Ubisoft déçoit une nouvelle fois sur le comportement des PNJs et des ennemis : ceux-ci sont toujours aussi incohérents dans leur comportement. Cela déteint vraiment sur un titre qui paraissait prometteur mais qui, au final, en fait un peu trop, en plus de quelques bugs, le tout saupoudré d’un humour parfois trop lourd. On a le sentiment que la saga est à bout de souffle tant le résultat reste fun mais médiocre dans l’ensemble. Sur Stadia, le portage est vraiment très propre même s’il est bloqué à 30FPS. Ceci dit, la coop avec Stream Connect ajoute une réelle plus-value qui peut vraiment convaincre à craquer… Bonne révolution à Yara, les guérilleros !